La résistance au gaz de schiste s'internationalise

Publié le par collectif anti-gaz de schiste des Arcs sur Argens

 

Des manifestations étaient prévues dans de nombreux pays tentés par l'exploitation de cette énergie 

Alors que de plus en plus de pays s'ouvrent à l'exploration et l'exploitation des pétrole et gaz de schiste, les contestations se succèdent. Samedi 19 octobre, des manifestations étaient organisées en France (à Paris, Toulouse, Lille), aux Etats-Unis, au Canada, en Angleterre, en Allemagne ou encore en Roumanie à l'occasion de la Journée mondiale contre le gaz de schiste.

Car, si ces hydrocarbures non conventionnels font miroiter aux entreprises et aux pays revenus, recettes fiscales et emplois - jusqu'au rêve d'une indépendance énergétique -, ils sont vertement critiqués pour leurs conséquences néfastes sur l'environnement ainsi que sur le climat. Tour d'horizon de ces mouvements d'opposition.

En Roumanie, le recul de Chevron Deux mois de protestations de villageois contre des projets d'exploration du gaz de schiste à Silistea, dans le nord-est du pays, ont eu raison de Chevron. Le géant américain de l'énergie a annoncé la suspension de ses activités, jeudi 17 octobre, au lendemain d'échauffourées entre gendarmes et opposants qui bloquaient la voie d'accès au site où le pétrolier comptait forer son premier puits.

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L'objectif pour la Roumanie est de s'affranchir des coûteuses importations de gaz russe. Selon les dernières estimations de l'Agence américaine d'information sur l'énergie (EIA), publiées en juin, le pays abriterait, avec l'Ukraine et la Bulgarie, 5 500 milliards de mètres cubes de gaz de schiste.

Les opposants, eux, ne l'entendent pas de cette oreille, alors que la fracturation hydraulique, qui consiste à injecter à haute pression dans la roche d'énormes quantités d'eau, de sable et d'additifs chimiques pour extraire les hydrocarbures, est accusée de polluer les nappes phréatiques et de fragiliser les sols.

Au Royaume-Uni, l'engouement ralentit.

Alors qu'une campagne de forages est en cours dans le sud de l'Angleterre, l'engouement de la population britannique pour le gaz de schiste s'érode. Selon un sondage publié le 1er octobre par l'université de Nottingham, 55 % des Anglais soutiennent aujourd'hui la fracturation hydraulique, contre 62 % en juillet.

Entre-temps, des milliers d'opposants se sont relayés dans la région du Sussex, après le début de forages par l'entreprise Cuadrilla Resources à Balcombe, le 2 août. La société britannique a obtenu, en décembre 2012, l'autorisation de reprendre les explorations qu'elle avait dû interrompre en 2011 en raison de secousses telluriques survenues sur un autre site, dans le nord de l'Angleterre.

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Autre argument mis en avant par les opposants à l'exploitation du gaz de schiste : le coût de la fracturation hydraulique serait deux fois plus élevé qu'aux Etats-Unis, ce qui devrait entraîner une baisse très limitée du prix de l'énergie dans le pays, selon des données récentes de l'agence Bloomberg.

En Ukraine, la population mobilisée

L'exemple roumain a fait des émules dans l'Ukraine voisine : le 17 octobre, des centaines d'habitants ont manifesté contre les projets de... Chevron d'exploiter le gaz de schiste dans leur pays. En 2012, le géant américain a remporté un appel d'offres pour exploiter le gisement d'Olesky, dans l'ouest du territoire, dont le gouvernement estime les réserves à 2 980 milliards de mètres cubes de gaz.

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Au Canada, une opposition musclée

Coup de feu, cocktails Molotov et véhicules de la gendarmerie brûlés : au Canada, la mobilisation contre l'exploitation du gaz de schiste a pris un tour violent, jeudi 17 octobre, et une quarantaine de manifestants ont été arrêtés à la suite de heurts avec les forces de l'ordre.

Depuis le mois de septembre, ces opposants, qui comptent des Amérindiens dans leurs rangs, cherchent à empêcher une entreprise gazière canadienne, SNW Ressources, d'effectuer des tests sismiques dans l'est du Nouveau-Brunswick, sur la côte atlantique.

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En France : la crainte d'expérimentations

Le contentieux qui déchaînait depuis plusieurs mois les passions a été tranché : le Conseil constitutionnel a décidé, le 11 octobre, de valider la loi du 13 juillet 2011, dite loi Jacob, qui interdit l'usage de la fracturation hydraulique. Il a ainsi rejeté la question prioritaire de constitutionnalité déposée par l'entreprise texane Schuepbach.

Si écologistes et organisations non gouvernementales (ONG) se sont réjouis de cette décision, ils estiment que le débat n'est pas totalement clos puisque la loi Jacob prévoit la mise en place d'une commission chargée d'" émettre un avis public sur les conditions de mise en oeuvre d'expérimentations réalisées à des fins scientifiques, sous contrôle public ". Or, cette commission n'a jamais été réunie.

" Les industriels ont déjà commencé leur lobbying sur cette question de l'expérimentation ", dénoncent plusieurs ONG dans un communiqué publié vendredi.


Audrey Garric

  • Une ressource assez bien répartie dans le monde

    Hydrocarbures Le gaz et le pétrole de schiste - ou de roche mère - sont classés parmi les hydrocarbures non conventionnels. Le gaz de schiste est issu d'un enfouissement important, à environ 4 000 m. Le pétrole de schiste est enfoui entre 2 000 et 4 000 m.

    Réserves L'Agence internationale de l'énergie (AIE) estime que les ressources en gaz non conventionnels dans le monde sont, en ordre de grandeur, comparables aux réserves en gaz conventionnel. Elle pronostique que le gaz non conventionnel comptera pour près de la moitié de l'augmentation de la production de gaz mondiale d'ici à 2035.

    Régions Toujours selon l'AIE, les régions les mieux dotées en gaz et en pétrole de schiste seraient l'Amérique du Nord (27 % des réserves estimées), devant l'Asie-Pacifique (26 %), l'Amérique du Sud (18 %) et l'Europe (11 %).

 

Le Monde 20 octobre 2013 (extraits)

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