Dossier gaz de schiste de Libération du 29/11/2012

Publié le par collectif anti-gaz de schiste des Arcs sur Argens

Gaz de schiste, la France sous pression

Malgré le moratoire sur l’exploration par fracturation hydraulique, le recours à ce nouveau type d’énergie fossile divise les politiques.

Arnaud Montebourg a le sens du timing. A quelques heures de l’ouverture du «débat national sur la transition énergétique» ce matin, le ministre du Redressement productif a remis une pièce dans la machine à gaz de schiste. Qu’il vaudrait «mieux produire ici si nous l’avons, que l’importer». Et de défendre au nom du «bon sens» la recherche d’une «nouvelle génération de technologies propres qui permettraient d’extraire [ces hydrocarbures] sans abîmer» l’environnement puisque la fracturation hydraulique, la seule technique d’extraction à ce jour, est interdite en France par une loi de juillet 2011 adoptée sous la droite.

Du gaz de schiste made in France ? C’est la petite musique que certains sifflotent avec insistance à gauche depuis quelque temps. De Louis Gallois à Michel Rocard - le même qui se battait contre le réchauffement climatique quand il était ambassadeur des pôles - pour qui la France serait «bénie des Dieux» en raison de son sous-sol, en passant par François Hollande, qui a ravi les partisans des gaz de schiste en faisant remarquer, mi-novembre, qu’il ne pouvait pas interdire la recherche sur les alternatives à la fracturation hydraulique.

«Curseur». Mais pour les écologistes, qui ont fait de ce dossier le «curseur inoxydable»d’appartenance à la majorité, le Front de gauche et une partie des socialistes, le seul discours présidentiel qui compte, c’est celui de mi-septembre devant la Conférence environnementale, quand Hollande a interdit tout permis d’exploration pendant son quinquennat. «Ce jour-là, les anti ont gagné, estime l’entourage de la ministre écologiste, Cécile Duflot. Au pire, dans cinq ans on a trouvé une technique moins dommageable. Au mieux, on a enfin lancé le débat sur le nouveau modèle de développement basé sur une économie décarbonée.» Pour ne plus limiter l’enjeu actuel aux effets nocifs de la fracturation hydraulique sur l’environnement et réfléchir à comment combiner croissance et réduction des émissions de gaz à effet de serre. Analyse de fond partagée par Jean-Luc Mélenchon pour qui les gaz de schiste «sont une fainéantise intellectuelle et technique» empêchant de penser le modèle énergétique français autrement.

«Conneries». Le PS, lui, abrite deux écoles d’opposants aux gaz de schiste. D’abord, les élus de territoires aux sous-sols prometteurs (la Seine-et-Marne, notamment) pour qui l’exploitation de cette ressource vaudrait retraite politique. Car, dans ces zones périurbaines densément peuplées, construire des puits de forage reviendrait à démolir les pavillons de leurs administrés. Ensuite, les promoteurs d’un socialisme plus écolo-compatible. «Le vrai choix est entre le court terme - on extrait et tant pis pour les dégâts et le réchauffement climatique - et le long terme . Nos petits-enfants méritent qu’on se détourne de la drogue dure des énergies fossiles et on met le paquet sur les renouvelables. Mon choix est fait», revendique le député du Gers Philippe Martin, qui en a «marre d’entendre les conneries» sur le sujet.

Les arguments brandis par le lobby pro-gaz de schiste - emplois, indépendance énergétique, rétablissement de la balance commerciale plombée par les importations de gaz et de pétrole - sont alléchants en période de crise. «Faux ! répond la sénatrice Laurence Rossignol. Si on les exploitait, on ne tirerait pas 1 euro des gaz de schiste en France avant au moins 2020, les gisements d’emploi qu’on nous fait miroiter ne sont que des bulles qui vont s’épuiser comme la ressource et le meilleur outil pour réduire le déficit commercial, ce sont les économies d’énergie.» Quant à la recherche, les anti réclament que l’argent public soit massivement investi dans les énergies renouvelables, pas dans d’hypothétiques techniques propres. Ce qui est un choix politique.

Une source de richesse ou une mine de problèmes ?

Le gaz de schiste offre des perspectives économiques sans régler la question du réchauffement climatique.

Les gaz et les huiles de schiste représentent des enjeux économiques et géopolitiques majeurs. D’où un déploiement massif de propagande et de publicité par les acteurs concernés (gouvernements, entreprises, ONG), prêts à défendre leurs intérêts ou leurs options politiques et idéologiques. Bombardés d’affirmations contradictoires, les citoyens sont la cible de cette désinformation massive. Les unes décrivent un nouveau miracle économique et énergétique, les autres un cauchemar environnemental. La question d’une expertise indépendante susceptible d’éclairer citoyens et gouvernants est plus que jamais posée.

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