A la découverte de la biodiversité de l'Aille avec Marjorie Ughetto: compte-rendu, photos et vidéos

Publié le 15 juin 2019 par Collectif Arcois pour la Planète

L'Aille est un affluent de l'Argens qui fait l'objet d'un inventaire sur 10 ans dans le cadre des ZNIEFF (Zone naturelle d'intérêt faunistique et floristique) ; cette rivière est classée dans sa partie qui traverse la Réserve Naturelle de la plaine des Maures (plus de 5000 ha entre les Mayons et Vidauban sur 5 communes) : preuve que son écosystème constitue une vraie richesse. Et ce, d'autant que le cours d'eau draine les eaux provenant de la Provence calcaire, du côté nord de son bassin versant, mais aussi cristalline, du côté sud et du côté ouest de son bassin versant.

Si 7 km de son cours sont à peu près exempts d'activités humaines, elle reste une rivière polluée (près de 450 molécules provenant d'activités humaines ont été recensées) : il faut dire que sur son bassin, on trouve à la fois de nombreuses parcelles viticoles en agriculture conventionnelle, des zones urbanisées en expansion mais aussi un mega tas d'ordures ménagères nommées l'ISDND (décharge contrôlée récemment fermée car saturée) de Balançan avec les risques d'infiltration des lixiviats. D'autre part, le cours d'eau n'est pas à l'abri du phénomène des espèces exotiques envahissantes. Parfois introduites par mégarde, elles peuvent être végétales : érable negundo, platane... qui se développent au détriment de l'aulne glutineux (qui a un fort pouvoir dépolluant) ; elles peuvent aussi être animales : tortue de Floride, perche soleil ... Ce qui nous rappelle un premier grand principe qui régit la nature :

les liens entre êtres vivants qui coopèrent dans des milieux qu'ils se sont appropriés peuvent être rompus ; soit parce que l'on supprime un élément (une espèce), soit parce que l'on en introduit une ayant d'autres caractéristiques, soit parce que les conditions initiales de l'habitat sont modifiées (réchauffement climatique)

L'Aille connait d'importantes crues car elle est une rivière sous influence du climat méditerranéen et le sous-sol de son bassin versant est constitué de terrains imperméables, faits de gneiss et micaschistes, elle est donc alimentée par des petits cours d'eau temporaires (type oued) ; de plus, au niveau de la commune des Arcs, elle sillonne dans un étroit corridor ; ainsi son débit peut passer de 2m3/s à 300m3/s (en juin 2010). Jusque dans les années 80, on y exploitait des sédiments, notamment son sable prisé jusqu'à Marseille pour sa qualité constituée d'éléments très durs (le quartz issu de l'érosion des roches locales). Aujourd'hui elle est un espace récréatif, pour ses berges de sables et galets mais elle est aussi propice à la pêche par l'alternance des zones à fort courant et zones plus calmes (radiers et pools pour les connaisseurs).

Les crues sont atténuées dans cette zone parce que l'on se trouve sur la forêt communale et que les berges ne sont pas délestées des embâcles. En effet la ripisylve ou forêt de bord de rivière est précieuse pour ralentir l'eau pendant les crues. Là où l'on préfère nettoyer au sens d'enlever le bois mort et les racines, domestiquer les rives ou encore canaliser, on déplace le problème des inondations en aval. Certains agriculteurs conventionnels suppriment cette forêt pour gagner de la lumière sur leurs champs et des surfaces à cultiver alors qu'elle leur serivait déjà gratuitement en accueillant une richesse biologique qui les aiderait dans leur lutte contre les ravageurs. Car enfin il faut rappeler un second principe de la nature :

la monoculture est une aberration écologique tant elle agresse la nature qui réagit par la prolifération des ravageurs ; et l'agriculteur conventionnel de répondre par la panoplie des produits chimiques qui tue sans discernement et fait décliner un peu plus la biodiversité ; si le grand public est sensibilisé à la cause des abeilles, il ne faut pas oublier tous les autres pollinisateurs silencieux (papillons, abeilles sauvages, guêpes etc…) qui eux ne produisent pas de miel...

On ne saurait que trop préserver les ripisylves qui ont, en plus de leur capacité à lutter contre les inondations, une capacité extraordinaire d'épuration (on a cité plus haut le cas de l'aulne) ; de plus elles sont comme des oasis en climat méditerranéen grâce à leur effet « brumisateur » des végétaux à feuilles caduques qui apportent aussi ombrage en période estivale.

Enfin troisième principe d'écologie :

les fleuves sont les nourriciers des mers : il est donc nécessaire de laisser le bois mort et autre matière organique parvenir jusqu'aux mers pour alimenter en nutriments les fonds marins et donc la faune halieutique.

Voilà une balade en bord de rivière qui a permis de prendre toute la mesure des défis écologiques actuels. Merci Marjorie ! Merci Agnès pour le compte-rendu!